BMCR 2007.02.53

Este II — La Necropoli di Villa Benvenuti. Monumenti Antichi pubblicati per cura della Accademia Nazionale dei Lincei, serie monografica volume VII (LXIV della serie generale)

, , , Este. Monumenti antichi ; 51. Serie monografica, 2. Roma: G. Bretschneider, 1985-. volumes : illustrations, maps, plans ; 33 cm.. ISBN 8876890831. €290.00.

La publication exhaustive des nécropoles Vénètes d’Este, initiées en 1985 par A.M. Chieco Bianchi et L. Capuis avec le volume (Este I — Necropoli Casa di Ricovero, Casa Muletti Prosdocimi, Casa Alfonsi) se poursuit en 2006 avec cet ouvrage magistral consacré à un seul site, cette fois-ci, la Necropoli di Villa Benvenuti. Comme bien souvent pour les fouilles archéologiques de cette région et tout particulièrement pour les nécropoles, les résultats ne sont publiés que près d’un siècle après leur découverte! Les 99 tombes de ce site, couvrant une période allant du 8ème siècle av. J.-C. à la romanisation (2ème siècle av. J.-C.), furent en effet mises au jour entre 1879 et 1904, ce qui explique la tâche ardue (et le courage!) des deux auteurs lors de la reconstitution de l’inventaire des offrandes funéraires, mais aussi de l’organisation spatiale de celles-ci dans la tombe elle-même.

Introduzione.

Une très (trop?) brève présentation du site et de son insertion urbaine actuelle est donnée.

Abbreviazioni.

Les 207 références bibliographiques sont fournies, certaines sous forme abrégée.

Cronaca delle scoperte.

A travers l’analyse des chroniques manuscrites de fouille, de croquis et de notices, les deux auteurs reconstituent, tant bien que mal, l’historique des excavations, depuis la découverte fortuite, en 1840, d’un bronze antique dans les jardins de cette demeure du 18ème siècle, jusqu’aux campagnes de fouille extensives de 1879-1880, 1902, 1904 et à des sondages nettement plus récents (1987). Pourquoi ne pas avoir profité de l’occasion pour fournir un plan reprenant l’intégralité des emplacements de tombes tels que donnés par les croquis des archéologues (aussi imprécis soient-ils)?

Catalogo.

On saura gré aux auteurs d’avoir précisé d’emblée les limites de leur publication en insistant sur l’important retard de publication, et sur les difficultés de reconstitution et de compilation des informations tombe par tombe. Malgré tout, le catalogue archéologique présenté apparaît d’une étonnante clarté et d’une précision impeccable. On est évidemment déçu de ne trouver que si rarement mention des restes humains associés aux dépôts funéraires, le mort étant par essence l’objet principal de la tombe, mais il faut dire que les archéologues ne s’embarrassent que très récemment des squelettes ou des incinérations. Particulièrement intéressante est la présence d’objets à connotation magique associés aux offrandes funéraires: astragales de boeuf ou d’ovin/caprin, dents de porc, d’âne ou de cheval, coquillages ( Glycymeris, Cardium/Cerastoderma edule, Chlamys, Bolinus tronculus, etc.) parfois sous forme fossile (tombe 290).

Appendice.

Relégués dans les appendices, mais au moins présents dans ce volume, plusieurs études complémentaires permettent de replacer cette monographie archéologique dans son contexte environnemental.

Dans “Analisi dei resti ossei umani”, menée par le Département de Biologie de l’Université de Padoue, la particularité des ossuaires Vénètes est bien mise en valeur, avec ce regroupement de plusieurs sujets dans un même contenant (voire ce mélange des contenus à chaque réouverture de tombe?). En revanche, on aurait pu se dispenser des mesures crâniennes et post-crâniennes sur les restes de sujets incinérés, car les fortes températures de combustion sont responsables d’importantes déformations osseuses rendant totalement caduques et inutiles ces mesures. On regrettera également que la détermination du sexe soit fondée sur des critères désormais abandonnés tenant à l’examen d’ossements autres que le bassin; en l’absence de l’os coxal, il apparaît en effet bien présomptueux de fournir une détermination du sexe. Cette remarque serait sans grande importance si le sexe de l’occupant de la tombe ne constituait pas une information de poids dans l’analyse du choix des offrandes funéraires (voir plus loin). Il apparaît ainsi parfois moins critiquable d’avouer son incapacité à déterminer un sexe que d’en donner (sans aucune justification bibliographique, d’ailleurs), une affirmation peu justifiée: par exemple tombe 283 (femme d’après l’épaisseur de la corticale fémorale et humérale) ou 296 (femme, notamment d’après les mensurations de l’odontode). On ignore également la méthodologie du classement des individus adultes en différentes classes d’âges (20-40, 40-60 ans et au-delà).

Dans “Analisi dei resti ossei animali e loro ruolo rituale funerario”, menée par l’équipe d’archéozoologie du Museo Pigorini (Rome), avec une bonne bibliographie cette fois-ci, on apprend que les mollusques semblent systématiquement associés à des sépultures féminines et/ou d’immatures (avec cette réserve sur le sexe, comme énoncée plus haut).

Dans “Situla Benvenuti: tecnologia, restauro e riproduzioni sperimentali”, S. Buson fournit quelques données techniques non seulement sur la restauration de l’objet phare du Museo Nazionale d’Este découvert en 1880, mais aussi sur la fabrication de cette situle en bronze couverte de scènes de la vie quotidienne. Lors de cette étude d’archéologie expérimentale, en 1997, il a pu reconstituer les différents stades de fabrication de cet objet, avec plusieurs écueils techniques, pour une durée minimale de travail de près de 113 heures. D’autre part, des restaurations, non seulement récentes (19ème et 20ème siècle), mais aussi antiques, ont pu être mises en évidence.

Dans “Necropoli Casa di Ricovero: analisi antropologica e archeologia a confronto”, L. Ovidi fournit des éléments de comparaison de la nécropole de Villa Benvenuti avec celle, contemporaine et voisine, de Casa di Ricovero (il s’agit vraisemblablement d’une reprise de son travail de thèse, qui portait le même titre). Si les mêmes limitations muséographiques sont présentes (les fouilles sont largement centenaires), cette comparaison est amplement justifiée par l’importante quantité de tombes étudiées (45). Néanmoins, on est très vite replongé dans cette perplexité de la détermination des sexes et dans cette sur-exploitation et sur-interprétation des données anthropologiques. On peut d’ailleurs se demander si les critères de sexualisation du défunt d’après les offrandes funéraires sont systématiquement superposables entre un immature de 3-4 ans (tombe 189) et ceux d’une adulte mature (tombe 144)! Toujours est-il que si l’on tient compte de ces déterminations (aussi fantaisistes puissent — elles paraître pour certains), on est frappé de la grande correspondance entre détermination archéologique du sexe et détermination anthropologique. Une importante carence de tombes masculines apparaît alors, sans qu’aucune explication ne soit fournie:

La squarsità numerica di uomini caratterizza in realtà tutto il campione preso in esame e sembra coincidere con quanto attestato in altre aree dell’Italia protostorica, pur con le dovute eccezioni: sebbene non sia da escludere un errore di stima per lo scambio tra giovani maschi e donne adulte (le quali ultime possono presentare caratteristiche fisico-anatomiche molto simili a quelle dei primi), va ricordato che in tutto il panorama protostorico italiano la presenza femminile caratterizza in maniera preponderante le necropoli (p. 483).

Ceci n’est pas tout à fait vrai. D’autres nécropoles protohistoriques d’Italie du Nord, comme Monterenzio Vecchia ou Monte Bibele, par exemple, dans la province de Bologne, sont loin de présenter un déficit masculin puisque le sex ratio est aux alentours de 1:1. D’autre part, de l’aveu même de L. Ovidi, ces statistiques ne sont pas forcément très valables, en raison de l’important risque d’erreur lors de l’estimation du sexe.

A noter enfin l’absence d’appendice consacré à l’étude paléographique et onomastique des graffitis, pourtant nombreux sur les céramiques de ce site, et qui auraient mérités à eux-seuls un chapitre justifié.

Cet ouvrage constitue dans tous les cas une monographie importante et remarquable sur le plan de l’inventaire et de la classification archéologique. Elle permet, nécropole après nécropole, de mieux cerner non seulement la production céramique et métallurgique Vénète, mais aussi tout son contexte funéraire. La qualité tient également à l’impressionnante iconographie (dessins et photographies noir et blanc) reprenant les objets les plus pertinents, tombe par tombe.

On attend donc avec impatience la publication d’autres nécropoles Vénètes pour élargir ce corpus: Este Capodaglio (A. Bondini-Caporale et A. Ruta Serafini), Este Scarabello et Este Via Nazionale (C. Michialon et A. Ruta Serafini).