BMCR 2020.09.42

Epigraphische Notizen Zur Erinnerung an Peter Herrmann

, Epigraphische Notizen Zur Erinnerung an Peter Herrmann. Hamburger Studien zu Gesellschaften und Kulturen der Vormoderne, 6. Stuttgart: Franz Steiner Verlag, 2019. 280 p.. ISBN 9783515124560. €52,00 (pb).

[Les noms des auteurs et les titres complets sont donnés à la fin du compte-rendu.]

Ce volume intéressant à plusieurs égards renferme les actes du colloque « Epigraphische Notizen » tenu en mai 2017 à l’université de Hambourg, à la mémoire du grand épigraphiste Peter Herrmann (1927-2002), professeur d’histoire ancienne à la même université et directeur des Inscriptiones Graecae à Berlin (1994-2001), sa deuxième patrie académique. Il vient s’ajouter aux autres hommages rendus lors de sa vie[1] ou posthumes,[2] sans oublier la réédition récente de la plupart de ses articles, par les soins de Wolfgang Blümel, qui donne ainsi une seconde vie à sa production multiforme.[3]

Après l’introduction de l’éditrice, l’ensemble des contributions de ceux qui ont connu et apprécié ce spécialiste de l’Asie Mineure concerne des thématiques qui lui ont été chères ou sont inspirées par ses travaux – entre autres, la prosopographie, les honneurs et l’évergétisme : la réalisation du corpus des inscriptions de Sardes, dans le contexte de son intérêt majeur pour la Lydie[4] (G. Petzl) ; son travail d’épigraphiste à Milet, illustré par les trois volumes de I. Milet VI, en collaboration avec N. Ehrhardt et W. Günther (N. Ehrhardt) ; les adoptions et les stratégies familiales à Milet à la fin de l’époque hellénistique (L.-M. Günther) ; l’importance de la description matérielle des inscriptions et de leur insertion dans un ensemble monumental, avec un choix d’exemples pour l’Asie Mineure sur l’ubiquité des statues honorifiques d’empereurs, gouverneurs et notables locaux (W. Eck) ; la garantie des fondations et le rôle des curatores et logistai, avec une étude de cas sur une stéphanéphorie à Magnésie du Sipyle, TAM V.2 1345 (M. Horster) ; les voyages d’Hadrien et le besoin d’une nouvelle biographie de l’empereur (H. Halfmann) ; les plaintes contre les abus des soldats romains dans la partie orientale de l’Empire, au sujet du débat engendré par la monographie incontournable du savant honoré[5] ; ce dernier article se place dans le contexte d’une autre controverse, plus large, sur la « crise » du IIIe siècle,[6] et saisit l’occasion pour rééditer l’inscription bilingue EKM II 432 de Pella, connue depuis peu, qui retranscrit la question et la réponse intéressant l’ordo splendidissi[mus coloni]ae Pellesium provinciae Macedoniae (R. Haensch). Au fil des pages, on retrouve des évocations répétées des projets et publications de P. Herrmann, qui retracent son parcours scientifique, parfois en citant des échanges épistolaires – par exemple, avec Louis Robert – ou encore ses lettres de jeunesse, lors de sa bourse de voyage en Méditerranée.[7]

Quel meilleur hommage pour un épigraphiste que de faire connaître des inscriptions inédites ou d’améliorer la lecture et la compréhension des textes connus – sur ce point, le présent ouvrage offre une moisson non-négligeable. H. Malay et M. Ricl publient deux inscriptions honorifiques d’époque hellénistique : la première, trouvée près de Maionia et datant de 153/152 ou 152/151 av. J.-C., concerne Sôkratès fils d’Artémidôros et émane du koinon des Méoniens de Lydie Brûlée, τὸ κοινὸν τῶν περὶ τὴν Κατακεκαυ[μένην] Μαιόνων, association attestée pour la première fois – malheureusement, la liste des communautés concernées, sans doute des [κατοικίαι?], continuait dans la partie perdue ; la seconde inscription, d’Aigai, remercie dans la première moitié du IIIe s. av. J.-C. deux δικασκόποι, examinateurs de procès (déjà connus à Aigai, Mytilène et Kymè), et fournit le nom d’un festival inconnu par ailleurs, les Β̣ουλάψια. La lettre de Septime Sévère à la cité d’Aizanoi (LBW 874 = ILS 8805 = IGR IV 556), considérée comme perdue mais retrouvée par M. Wörrle au sanctuaire de Zeus, est rééditée et amplement commentée, avec un texte amélioré et une nouvelle datation, de 197. Après l’avoir signalée ailleurs, A. Chaniotis publie une dédicace de la première moitié du IIe s. av. J.-C. à Zeus Συνετηνός, dont l’épithète topique place à son lieu de découverte, Bucakköy, une localité Syneta ; cette dédicace de Carie émane d’un groupe considérable de 122 personnes (avec leurs patronymes, ce qui occasionne des commentaires onomastiques qui soulignent leur origine hétérogène), sans doute des colons militaires. K. Zimmermann fait connaître une dédicace de Patara, retrouvée en plusieurs morceaux, honorant le multi-évergète Opramoas de Rhodiapolis. Lors de l’édition de deux nouvelles bornes de Patara, du début du règne de Vespasien (sous le gouverneur Sex. Marcius Priscus) et d’époque tétrarchique, Chr. Schuler insiste sur l’activité intense concernant les routes et l’infrastructure lors des premières décennies d’existence de la nouvelle province et propose des scénarios sur les années 68-69 en Lycie. Chr. Wallner réédite plusieurs inscriptions latines fragmentaires d’Antioche de Pisidie, publiées d’après les Notebooks de W. M. Ramsay,[8] qu’il a eu l’occasion de retrouver dans les dépôts d’Antioche. Enfin, M. Adak publie l’inscription gravée sur la statue d’une matrone figurée dans l’attitude de pudicitia, provenant du territoire de Césarée de Cappadoce ; la statue fut commanditée par Fl. Arétaios pour sa fille Eupatoris, de rang consulaire ; l’éditeur identifie le commanditaire au médecin pneumatique Arétaios de Cappadoce, actif au IIe s. ap. J.-C., occasion de gloser sur la paideia grecque comme moyen d’ascension sociale.

L’ensemble est illustré par quelques dizaines de photos noir et blanc d’inscriptions inédites ou revues, de bonne qualité, ainsi que par des cartes. On ne peut que saluer la richesse des contributions de synthèse, dans la solide tradition de l’Altertumswissenschaft, ou l’acribie des éditeurs de textes nouveaux ou révisés, qui rendent remarquablement hommage à l’activité d’un savant touché par le bacillus epigraphicus.

Table des matières

Kaja Harter-Uibopuu, Vorwort
Georg Petzl, “Zum Inschriftencorpus von Sardeis – einem Vorhaben Peter Herrmanns”
Norbert Ehrhardt, “Peter Herrmann als Epigraphiker Milets”
Hasan Malay, Marijana Ricl, “Two New Hellenistic Inscriptions from Lydia and Aiolis”
Michael Wörrle, “Der Brief des Septimius Severus an Aizanoi”
Angelos Chaniotis, “Inscriptions from Bucakköy (Syneta?) in Karia”
Christof Schuler, “Strassenbau und Infrastruktur im flavischen Lykien. Zwei Neue Meilensteine aus Patara”
Klaus Zimmermann, “Opramoas in Patara”
Christian Wallner, “Ramsays Fragmente. Ein Lokalaugenschein im Depot von Antiocheia ad Pisidiam”
Mustafa Adak, “Der Pneumatiker Aretaios und ein Verehrer Platons aus Kappadokien”
Linda-Marie Günther, “Adoptionen in Milet – späthellenistische Familienstrategien?”
Werner Eck, “Ehre wem Ehre gebührt. Große oder außergewöhnliche statuarische Monumente als herausragende Ehrung in den kleinasiatischen Provinzen während der Kaiserzeit”
Marietta Horster, “Stiftungssicherung im römischen Osten: „römische“ Sanktionen und ökonomische Interessen”
Helmut Halfmann, “Hadrians Reisen: alte und neue Erkenntnisse”
Rudolf Haensch, “Übergriffe römischer Soldaten in den östlichen Provinzen des Imperium Romanum”
Abkürzungen

Notes

[1] À l’occasion de son 70e anniversaire, Epigraphisches Kolloquium zu Ehren von Peter Herrmann: Hamburg 30.-31. Mai 1997, dossier publié dans Chiron, 28, 1998.

[2] Lors d’une cérémonie commémorative en mai 2003, cf. Seminar für Alte Geschichte (éd.), Zum Gedenken an Peter Herrmann. 22. 5. 1927-22. 11. 2002, Hambourg, 2002 (en ligne, voir https://hup.sub.uni-hamburg.de/volltexte/2008/51/pdf/HamburgUP_HUR04_Herrmann.pdf).

[3] P. Herrmann, Kleinasien im Spiegel epigraphischer Zeugnisse. Ausgewählte kleine Schriften, Berlin-Boston, 2016 – avec un dossier très riche de 59 articles, sur plusieurs sujets (« Inschriften aus Lydien », « Inschriften aus Milet », « Inschriften aus verschiedenen Regionen », « Übergreifende Darstellungen »). Comme l’observait P. Hamon dans son compte-rendu, « les mélanges et hommages se multiplient aujourd’hui comme jamais, émiettant la production scientifique dans des volumes hétérogènes et difficiles d’accès. Il n’existe pourtant pas de meilleur moyen de rendre hommage à un savant que de rassembler ses œuvres, pour en donner à voir la cohérence, l’unité de vue et les inflexions au cours d’une vie de travail » (sehepunkte consulté le 11 juin 2020).

[4] TAM V (Tituli Lydiae), en deux fascicules (1981, 1989 ; un troisième de G. Petzl, 2007) ; P. Herrmann, H. Malay, New Documents from Lydia, Vienne, 2007 (ETAM 24).

[5] P. Herrmann, Hilferufe aus römischen Provinzen : ein Aspekt der Krise des römischen Reiches im 3. Jh. n. Chr., Hambourg, 1990.

[6] Cf., entre autres, G. Alföldy, « The Crisis of the Third Century from Michael Rostovtzeff and Andrew Alföldi to Recent Discussions », dans J. H. Richardson, F. Santangelo (éds.), Andreas Alföldi in the Twenty-First Century, Stuttgart, 2015 (HABES 56), p. 201-217.

[7] E. Herrmann, N. Ehrhardt (éds.), Peter Herrmann. Briefe von der archäologisch-epigraphischen Stipendiatenreise 1955/56 in den Ländern des Mittelmeerraums, Munich, 2008 (Quellen und Forschungen zur antiken Welt 54).

[8] M. A. Byrne, G. Labarre, Nouvelles inscriptions d’Antioche de Pisidie d’après les Notebooks de W. M. Ramsay, Bonn, 2006 (IK 67).