Table of Contents
[Auteurs et titres sont cités ci-dessous.]
Ce volume complète deux autres déjà parus, qui présentaient respectivement le contexte du « Vasilikos Valley Project » et les sites (vol. 10:I, 2004), puis le modèle d’occupation (« settlement pattern ») (vol. 10:III, 2013). Celui-ci présente les artefacts catégorie par catégorie, majoritairement la céramique, non sans en tirer des enseignements sur le type d’occupation de la région. D’emblée on nous annonce que l’exhaustivité n’était pas possible dans une telle entreprise, ni pour la surface couverte par la prospection, ni pour les artefacts eux-mêmes. S’agissant du premier point, I.A. Todd réaffirme sa conviction que l’échantillonnage est représentatif de l’ensemble du territoire sur quelque neuf millénaires (p. XXIX). Sur le second point, chaque auteur justifie le choix de l’échantillonnage.
Dans une brève introduction (p. XXXIII-XXXVII). I.A. Todd rappelle l’urgence de sauver ces données archéologiques menacées par un « développement » industriel, commercial et touristique dont le rythme s’accélère (et qui est inscrit désormais dans un « Master Plan »). On a ainsi repéré plusieurs nouveaux sites, majoritairement d’époque archaïque, mais aussi de l’Âge du Bronze, du Chalcolithique et d’époque romaine tardive.
La céramique est présentée période par période (chap. 1 à 6). (En plus des dessins qui sont insérés dans le texte après chaque chapitre, cette céramique est illustrée par les planches couleurs I et II.) J. Clarke présente la céramique du Néolithique et du Chalcolithique (p. 7-29). Elle discerne plusieurs fabriques qui trahissent une prédominance du V e millénaire, avec un fort déclin au IV e millénaire. M.T. Horowitz étudie la céramique du Bronze ancien et moyen (p. 31-70). En l’absence de sites fouillés, l’apport de cette étude ne constitue qu’un modeste pas vers une meilleure caractérisation chronologique des différents types (p. 40-45 et fig. 2.3). A.K. South s’occupe de la production du Bronze récent (p. 71-93). Elle ne prend en compte que les tessons diagnostiques et ne tire pas de conclusions sur les différents types d’occupation (lesquels sont précisés ailleurs). L’examen ne met en lumière aucune nouveauté frappante dans les types, mais révèle un bel échantillon des fabriques caractéristiques de la côte sud de l’île (p. 81). La céramique du Cypro-géométrique (CG) et du Cypro-archaïque (CA) a été confiée à A. Georgiadou (p. 95-127), qui situe d’emblée cette production dans le cadre du royaume d’Amathonte, car les types trouvent leurs exacts correspondants dans la céramique caractéristique de cette cité. Tout laisse donc entendre que la région relevait bien de cette entité politique. Il est frappant à cet égard que les artefacts qui pourraient être datés des CG I et CG II sont totalement absents des trouvailles (p. 104); le CG III apparaît donc clairement comme l’époque où le pouvoir politique amathousien se met en place dans la région (p. 104, 106). 1 Mais c’est bien l’époque archaïque, et spécialement la première partie (CA I : ca 750-600 av.), qui constitue le floruit économique de la région. L’analyse de M. Rautman, quant à elle, couvre pratiquement un millénaire: depuis l’époque classique jusqu’à l’époque romaine tardive (p. 129-157). Après avoir constaté l’évanescence de l’époque classique et une légère reprise à l’époque hellénistique, M. Rautman souligne la densité d’occupation à l’époque romaine dès Auguste, illustrée par une profusion de fragments de sigillée orientale A et de sigillée cypriote. Après un léger recul aux III e et IV e s., phénomène général dans toute l’île, la quantité de vases des fabriques African Red Slip, Phocean Red Slip (Late Roman C) et Cypriot Red Slip atteste d’une prospérité retrouvée à l’époque romaine tardive. Ce chapitre 5, comme d’ailleurs le suivant, qui porte sur les différentes époques qui vont du Moyen Âge à la fin de la domination anglaise, ont été rédigés plusieurs années avant la parution de l’ouvrage. Bénin pour ce qui est du chapitre 5, ce délai est cependant dommageable pour ce qui concerne la contribution de B. Walker (chapitre 6, p. 159- 198). En effet, les travaux récents ont fait considérablement progresser notre connaissance de la chrono-typologie de ces fabriques (p. 159). Le choix de l’échantillon s’est en outre effectué de manière aléatoire. La céramique de cette époque consiste en des productions locales, mais présente aussi une proportion considérable de vases importés. Bien que le XIII e s. soit peu représenté, la céramique atteste une présence humaine continue dans la vallée. Aux cours des XVIII e et XIX e siècles, Chypre est manifestement partie prenante du commerce atlantique.
Dans un court chapitre (chap. 7, p. 201-215), I.A. Todd présente rapidement les autres catégories d’artefacts qui font l’objet des chapitres suivants. Il s’agit de 1355 objets dont le catalogue est accessible en ligne (c’est l’Appendice III que l’on cherchera donc vainement dans le volume). Dans le chapitre 8 (p. 217-243), C. McCartney étudie les lames de pierre (« chipped stone industries ») qui proviennent de trois sites: Mari- Mesovouni — lequel a été depuis lors entièrement arasé (voir le cliché: Frontispiece 1, p. iii) —, Mari- Paliambela et Kalavassos- Mitsingites. Le premier montre une occupation entre le Néolithique acéramique et le Chalcolithique, avec une prédominance du LPPNB et de la phase de Chirokitia; le deuxième est en activité entre la fin du Néolithique et le Chalcolithique; le troisième entre le Chalcolithique et l’Âge du Bronze. I.A. Todd présente (p. 245-318) les « ground stone artefacts », appellation dont il reconnaît qu’elle est controuvée, mais qu’il conserve tout de même car son usage est largement répandu dans la communauté savante (p. 245). Il rappelle d’abord la typologie de ces objets dans la région à partir d’une part des fouilles de Kalavassos- Tenta et, d’autre part, de la prospection elle-même. Cela représente quelque 720 objets provenant surtout de la phase acéramique, mais dont certains sont de l’Âge du Bronze. 14 types sont distingués, notamment les haches, les herminettes, les « gaming stones », les meules dormantes, les meules mobiles, les marteaux, les pilons, les mortiers, les « masses d’armes », etc. Plusieurs conclusions sont tirées quant à la chrono-typologie des différentes catégories (p. 313-316). Dans le chapitre 10 (« Other artefacts »), I.A. Todd rassemble les autres objets, sans avoir la prétention d’en établir des catégories discrètes: basalte, cippes, monnaies, dipinti et graffiti, figurines, pierre [ sic ], verre, fusaïoles, appliques murales, poids, pipes, ivoire, sacarabée, sceau (p. 319-330).
Le volume se clôt par deux appendices de J.A. Smith, l’un sur un sceau d’époque classique (p. 331-334), l’autre sur une applique murale qui porte un signe du syllabaire cypro-minoen (p. 335-336). Suit une abondante bibliographie, une liste des sites qui furent repérés en prospection. Manque cependant un index thématique qui aurait été utile. On relève très peu d’incohérences dans les renvois ou les abréviations (par exemple, le sigle RPCh—p. 33 et 44—ne figure pas dans la liste des abréviations, p. XXV). Les illustrations sont de bonne qualité, mais certaines catégories sont privilégiées par les planches photographiques, comme les outils lithiques, alors que la céramique est surtout illustrée par des dessins en fin de chaque chapitre.
Ce volume de bonne tenue représente un outil très précieux pour qui veut appréhender le peuplement de cette vallée du Vasilikos à travers les âges, et il constitue, avec les deux volumes qui le complètent (10:I, 10:III), un exemple d’étude régionale qui devrait se multiplier pour mieux saisir la réalité de l’occupation de l’île dans son ensemble.
Sommaire
Liste des contributeurs
1. Preface, Ian A. Todd
2. The Commercial/Industrial Development of the Southern Vasilikos Valley, Ian A. Todd
Section A. Ceramics
3. Neolithic-Chalcolithic, Joanne Clarke
4. Early Bronze Age/Middle Bronze Age, Mara T. Horowitz
5. Late Bronze Age, Alison South
6. Geometric-Archaic, Anna Georgiadou
7. Classical-Late Roman Periods, Marcus Rautman
8. Mediaeval Period to Colonial, Bethany Walker
Section B
9. Other Artefacts, Ian A. Tod
10. Chipped Stone Industries, Carole McCartney
11. Ground Stone Artefacts, Ian A. Todd
12. Other Artefacts, Ian A. Todd
13. Appendix I. A Double-Sided Stamp Seal from Kalavasos- Arkhangelos, Joanna S. Smith
14. Appendix II. A Wall Brlcket Fragment with Cypro-Monoan Sign from Kalavasos- Kaparovouno, Joanna S. Smith
15 Appendix III. Catalogue of Artefacts, Ian A. Todd (Available on-line)
Notes
1. On comprend d’autant moins bien qu’A. Georgiadou (p. 95) suive M. Iacovou (2012) en situant la création du royaume au XI e siècle. Voir à ce propos mes remarques dans « La ville et le royaume d’Amathonte n’ont pas été fondés au XI e siècle », in D. Lefèvre-Novaro et al. (eds), Géosciences, archéologie et histoire en Crète de l’âge du Bronze récent à l’époque archaïque, Padoue, 2015, p. 353-375.