Tout auteur porte évidemment un regard jaloux sur son travail, le plus souvent mal lu, mal compris, mal interprété – et c’est un peu l’impression que j’ai moi-même éprouvée à la lecture de la réaction de Jamie Sewell à mon compte-rendu de sa monographie où il me semble voir, à mon tour, des “omissions” ou des “misrepresentations”. J’ai donc dû retourner à mon texte, et au sien, et il me semble nécessaire de revenir ici très brièvement sur les points fondamentaux de son argumentation.
Un rapide sondage auprès de la communauté anglo-saxonne et américaine de Rome m’a permis de constater que le titre choisi par l’auteur ne présente pas le caractère de limpidité in English qu’il lui prête : j’y ai recueilli des avis qui permettent de dater cette formation entre la fin de l’Âge du Fer et la Nova Urbs de Néron, ce qui justifie, à mon sens, une observation qui n’avait d’autre but que de clarifier le contenu du volume. Et il me semble que parler de l’“inappropriateness” de l’analogie proposée par Aulu-Gelle n’est guère cohérent avec ce qu’écrit l’auteur à la p. 86, “the above is not aimed at undermining the validity of Aulus Gellius’s text” ; mais je lirai avec intérêt les pages que l’auteur consacre à cette question dans l’article encore sous presse qu’il nous signale.
Il ne m’a pas échappé, par ailleurs, que deux des six chapitres du livre sont consacrés à l’influence de Rome sur les colonies latines fondées après 338. L’auteur est évidemment libre de contester l’existence historique de colonies antérieures, et il souligne à juste titre (comme je l’ai fait moi-même dans mon compte rendu) les lacunes du dossier archéologique relatif à celles-ci ; pourtant, puisque la question de la transmission du savoir architectural est, me semble-t-il, au centre de la recherche de son livre, je ne vois pas le problème qui peut exister à penser que des villes existantes, fussent-elles antérieures de deux générations, aient pu influencer l’urbanisme des nouvelles colonies.
En ce qui concerne l’ agger et la rue pomériale, j’ai sans doute effectivement mal interprété la phrase de la p. 62 “Olbia possibly had one [pomerial road] in its original design, which, in turn, probably influenced the form of the early Roman colonies”, puisqu’il écrit aussi ailleurs que celle-ci “developed independently on the Italian peninsula”. L’auteur à certainement raison de relever que le plan de sa fig. 60 ne se réfère pas à un état du début du IIe siècle, comme je l’ai écrit, mais au IIIe siècle ; mon erreur provient peut-être du fait que le document qu’il fournit présente des différences macroscopiques par rapport à sa source indiquée (Brown-Richardson-Richardson 1993, fig. 1) ; il demeure que son hypothèse de localisation de maisons de la “highest property-class” reste, pour le moins, aléatoire.
Je ne suis nullement choqué que l’auteur ait consacré 22 pages aux différents types de maisons grecques – le sujet est effectivement important –, dont il pense – c’est son droit le plus strict – qu’ils ont influencé l’habitat des colonies latines ; je n’y vois pas, pour ma part, de “clear similarities”, sauf à considérer, avec lui, la “rectangularity” comme un argument décisif à cet égard.
J’espère que cet échange aura contribué à clarifier les choses, et permis à Jamie Sewell de souligner les points qu’il considère comme forts de sa démonstration. Je persiste à trouver ce livre, comme je l’écrivais, “intéressant et stimulant”. Pourtant, selon la formule toujours actuelle de Beaumarchais, aujourd’hui encore mise en exergue par un grand quotidien français – qui l’a du reste bien mal servie –, “without the freedom to criticise, there is no true praise”.