Ces mélanges en l’honneur de R. Scholl, professeur à l’Université de Leipzig et directeur de la collection papyrologique conservée à la bibliothèque de la même université, sont divisés en deux parties. L’une rassemble des articles au sujet éclectique, l’autre contient l’édition de papyrus variés que l’on citera sous le sigle P. Scholl.
L’article de M. Rudersdorf sort du champ des études anciennes. Son auteur montre comment Mélanchton et son camarade de combat Camerarius s’employèrent à réaliser un renversement complet du dogme théologique traditionnel. Ce changement sans lequel le mouvement des Lumières des 17 e et 18 e siècles ne peut s’expliquer repose sur trois faits historiques: la réforme luthérienne, l’humanisme et ses nouvelles formes de formation scientifique, la naissance d’élites urbaines et de classes fondées sur la profession et le métier. L’auteur évalue aussi le rôle que l’Université de Leipzig a joué dans tous ces changements. Daniela Colomo et M. Gerhardt mènent une enquête sur le mot entuligma qui apparaît dans le P.Münch. III 142, une liste d’articles vestimentaires du 6 e s., et, si l’on accepte une proposition de K. Latte, chez Hésychius, κ, 2543. Selon les auteurs, ce mot désignerait du papier d’emballage, du matériel d’emballage, une couverture ou même un vêtement comme un voile ou une chaussette. U. Huttner met en lumière une contradiction dans le comportement des premiers chrétiens. En effet, dans la description du martyr de l’apôtre, les Acta Philippi incluent une longue malédiction par laquelle Philippe cherche à punir les païens d’Hiérapolis de Phrygie. Comme le montre la série de noms magiques utilisés par Philippe, cette imprécation provient d’une tradition magique. Or, les autorités chrétiennes tenaient la magie pour illicite. Ursula Kaplony-Heckel étudie les contrats conservés dans la tombe de Hapi-djefai, les papyrus de Deir el-Medineh et les règles de l’association des prêtres d’Horus du Fayoum pour confirmer que la vie quotidienne en Egypte était structurée autour du service des divinités et du mort. Roxana Kath analyse les similitudes entre l’art de l’acteur et l’art de l’orateur politique sous la République romaine. Ces similitudes ont mis en danger la crédibilité de la noblesse romaine. L’auteur discute les efforts variés déployés pour surmonter le problème, mais relève la confusion croissante à la fin de la République.
J. Kramer montre comment on désignait les Trévires et Trèves en grec. P. Pfeil revient sur la mort de Julien l’Apostat au cours de la campagne contre les Perses à l’été 363. A-t-il été assassiné par ses propres troupes, par un soldat chrétien, au cours d’une escarmouche avec les Perses? L’auteur pense que l’empereur a été tué au combat par un adversaire. Dans le second Roman de Setna en démotique, un passage est consacré à une compétition magique sous le règne d’un certain Menechpare Siamoun. Comme celui-ci semble être une représentation littéraire de Thoutmosis III, on a considéré ce passage comme une pièce relative à ce pharaon. L. Popko l’interprète comme un passage de propagande contre la 25 e dynastie. Charlotte Schubert applique les concepts du sociologue Georg Simmel (formes et contenus changeant selon le contexte) à l’étude des réformes apportées par Clisthène à la structure gouvernementale d’Athènes. L’organisation de l’espace politique athénien depuis la réforme de Clisthène est marquée par des répartitions numériques. Les proportions arithmétiques que l’on peut distinguer dans la réforme clisthénienne des tribus ont donné leur structure à l’organisation de l’espace politique à Athènes et ont profondément marqué la démocratie athénienne. Silke Trojahn traque les entrées “papyrus” et “papyrologie” dans diverses encyclopédies allemandes du 17 e s. à nos jours afin d’appréhender les connaissances et les opinions communes sur le sujet. On y voit la papyrologie considérée tantôt comme discipline auxiliaire tantôt comme discipline de base.
La seconde partie de l’ouvrage contient l’édition de textes conservés sur papyrus, ostraca ou parchemin. 1-2. Deux papyrus bilingues grecs-latins du 4e s. L’un porte la réponse officielle à une pétition (prov. inc., 370), l’autre un fragment d’une minute d’un procès (Héracléopolis, 394). – 3. Table de multiplication (Héracléopolite?, 5 e -6 e s.). – 4. Edition commentée du feuillet 36 r + v du glossaire latin-grec antique perdu transcrit en 1495 par Conrad Celtis. Il s’agit d’une partie consacrée aux bijoux en or. L’analyse de la manière dont les mots latins et grecs ont été assemblés permet à l’auteur de donner une vue du monde de l’ancienne bijouterie et de faire une série de découvertes linguistiques. – 5. Affranchissement testamentaire. Dans un testament, des esclaves sont affranchis parce qu’ils ont fait preuve de “bienveillance et d’affection” (Tholthis, 1 er – 2 e s). – 6. Demande faite au scribe royal pour acheter un produit (du sel?) pris sur un domaine impérial. La demande est transmise à un ergoskopos, titre inconnu jusqu’ici (Arsinoïte, après le 31 octobre 159). – 7. Reçu démotique sur ostracon pour la taxe syntaxis de Thèbes (3 avril 135 av. J.-C.). L’éditeur établit une liste des reçus de la taxe en question. – 8. Contrat de location pour dix ans d’une maisonnette et d’un verger avec diverses plantations dont des palmiers dattiers (Hermoupolis, 18 septembre 515). – 9. Edition d’un ostracon qui contient les comptes d’un domaine près de Thèbes (2 e s.) et retour sur la signification de pais/paides, enfants ou esclaves. – 10. Nouvelle édition du P.Giss.Univ. 11. Reçu du syntaximon, un impôt de capitation (Berenikis Themphorou, 81/82). – 11-12. Deux “lettres de protection” coptes (6 e /7 e s. ou plus tard). Dans l’une, le moine Jérémias est assuré que s’il revient au couvent dont il est parti, il ne subira aucun mal. Dans l’autre, Victor reçoit l’assurance que s’il reprend le travail il ne sera pas battu. – 13-15. Codex de papyrus de provenance inconnue daté du 6 e s. et contenant trois prescriptions médicales: un antidote, un cataplasme à base de miel, un antidote polyvalent. – L’édition des textes est accompagnée d’un index des mots qui apparaissent dans le glossaire de Celtis, dans les prescriptions médicales et dans les documents papyrologiques. D’excellentes photos en couleur permettent de vérifier les lectures des éditeurs.
Articles et éditions de textes rendent ces Mélanges en l’honneur de Reinholt Scholl des plus intéressants.