Si la masse considérable des inscriptions déliennes bénéficie d’un corpus achevé en 1972, ce dernier n’a pas d’index. Ce handicap a commencé à être surmonté par la parution, en 1992, du premier tome de l’ Index, dû à Jacques Tréheux et consacré aux étrangers.1 Y était annoncée la parution du volume consacré aux Déliens, qui aurait dû être une entreprise commune à J. Tréheux et à Cl. Vial. Le décès du premier auteur en 1994 fait que le travail revint à la seule Cl. Vial, mais nulle autre personne que l’auteur de la magistrale Délos indépendante (1984) n’était plus à même de mener à bien l’entreprise.
Plus que d’un index, il s’agit en réalité d’une impressionnante proposographie de tous les Déliens, attestés à Délos, mais aussi ailleurs. Sont ainsi enregistrés un Antigonos, “Délien”, enseveli à Athènes, SEG 43, 97, un certain …s, fils de Phillis, proxène de Carthaia ( IG XII 5, 542, 49). Toutes les sources sont invoquées, tous les rapprochements discutés, si besoin était. Il est vrai que les nombreux stemmata de Délos indépendante, auxquels l’auteur renvoie, rendaient ce travail plus aisé. En outre, les résultats de la thèse de Cl. Vial avaient été exploités dans le LGPN I, paru en 1987. On pourrait finalement se demander ce que l’ouvrage apporte de neuf, à part le rassemblement des seuls Déliens, qui associe les résultats de ces deux ouvrages. En réalité, l’index apporte bien des nouveautés. Vial a pu intégrer plusieurs nouveaux personnages, apparus dans les inscriptions publiées dans le BCH des années 1996-2000 par une nouvelle génération de savants “déliens”. Elle a aussi pu utiliser les résultats des thèses de Chr. Feyel, Les artisans dans les sanctuaires grecs aux époques classique et hellénistique à travers la documentation financière en Grèce (2006), notamment la liste des artisans (p. 189-297), celle de BMCR 2009.04.44,V. Chankowski, Athènes et Délos à l’époque classique. Recherches sur l’administration du sanctuaire d’Apollon délien (2008), pour ses datations et la liste des Déliens (p. 530-536); mais aussi des travaux, inédits ou publiés, de Fr. Prost sur la Délos archaïque. Aussi dispose-t-on d’un instrument de travail irremplaçable.
Une étude très fine de l’onomastique délienne est enfin possible, grâce à un ouvrage composé avec la plus grande rigueur. Les personnes enregistrées dans l’index sont signalées avec une subtile différentiation, qui distingue ceux qui sont sans aucun doute déliens, des “certainement”, “très probablement”, “probablement” et “peut-être” Déliens. Lorsque l’on peut hésiter sur l’orthographe d’un nom, Vial propose une entrée pour chaque possibilité: ainsi
Naturellement, on peut n’être pas toujours en accord avec les opinions de l’auteur, parfois exprimées de manière abrupte — l’index ne permet sans doute pas de développer un argumentaire— mais cela ne porte que sur des points mineurs2).
Nous disposons donc d’un ouvrage attendu, qui tient toutes ses promesses. Il ne s’agit malgré tout que d’une partie de l’index des ID, qui est loin d’être achevé, même pour les individus. Certes, nous disposons d’une liste à jour des Italiens (exclus de l’ Index
La réussite de l’ouvrage de Cl. Vial peut susciter l’attente d’autres volumes de l’ Index de Délos, qui ne doit pas se imiter aux noms de personnes. Cependant, étant donné les difficultés de l’entreprise, la masse considérable de la documentation, si le rythme actuel de publication se maintient, ce sont d’autres générations qui pourront en voir l’achèvement. Il ne s’agit naturellement pas de blâmer qui que ce soit: après tout, contrairement au site de Delphes, à Délos, nous disposons d’un corpus complet et des premiers volumes de l’ Index, issus d’un travail ingrat et de longue haleine. Mais la lenteur, sans doute inévitable, de ces publications plaide pour une pratique différente: pour les cités (ou les régions) où la masse d’inscriptions est si importante que la publication en est répartie en plusieurs volumes, il faudrait que chacun d’entre eux soit muni d’un index particulier. Il serait ainsi souhaitable d’adopter cette pratique pour les futurs volumes des IG II 3 (comme cela a été fait pour les IG IX I 2).
Quoi qu’il en soit, on ne peut que remercier l’auteur de nous avoir donné un si précieux instrument de travail.
Notes
1. Voir O. Masson, Bull. ép. 1996, 311 et P. Herrmann, Gnomon 67 (1995), p. 369-370.
2. Ainsi au sujet du décret dit d’
3. J.-L. Ferrary, Cl. Hasenohr et M.-Th. Le Dinahet, dans Chr. Müller et Cl. Hasenohr (éd.), Les Italiens dans le monde grec, II e siècle av. J.-C.-Ier siècle ap. J.-C. Circulation, activités, intégration (2002), p. 186-239.
4. Inversement, il n’y a pas lieu de reprocher à Chr. Feyel, comme le fait Vial (avant-propos, p. 9), d’avoir retenu dans sa thèse des critères trop restrictifs pour établir la liste des artisans déliens: quelle valeur aurait eu une statistique comparative (artisans déliens-étrangers) reposant sur des “peut-être” ou des incertitudes en chaîne? En toute rigueur, Feyel a eu raison et il faut simplement comprendre que le nombre des artisans déliens est un chiffre minimum. L’objectif du travail de Feyel n’était évidemment pas le même que celui de l’ Index II.