BMCR 2014.11.09

Exchange Networks and Local Transformations: Interaction and Local Change in Europe and the Mediterranean from the Bronze Age to the Iron Age

, , Exchange Networks and Local Transformations: Interaction and Local Change in Europe and the Mediterranean from the Bronze Age to the Iron Age. Oxford; Oakville, CT: Oxbow Books, 2013. x, 179. ISBN 9781842174852. $76.00.

Table of Contents

Le volume a été initié dans le cadre d’une session du 14e congrès annuel de l’European Association of Archaeologists, tenu à Malte en 2008, et il a été clos début 2011. Les articles, rédigés en anglais, proposent d’explorer la question de l’influence des systèmes d’échanges sur les évolutions des sociétés de l’âge du Bronze et de l’âge du Fer de l’Europe continentale et de la Méditerranée, en portant une attention particulière aux effets des relations dynamiques entre transformations des traditions locales et développement des réseaux d’échanges interrégionaux, impliquant de fait des dialogues transculturels.

L’ouvrage débute par l’introduction de M. E. Alberti et S. Sabatini (p. 1-5) qui situent chaque contribution au sein de la structure de l’ouvrage et par rapport aux tendances actuelles de la recherche. Trois grands thèmes sont abordés au fil des articles : les rapports entre systèmes d’échanges et transformations des sociétés locales, les notions de transculturalité et d’hybridation, la possibilité d’établir des parallélismes entre Europe continentale et Méditerranée.

L’objectif principal du volume est de réunir des articles s’intéressant aux relations réciproques entre le développement de la culture matérielle et les réseaux d’échanges, étudiées ici à partir d’indices archéologiques régionaux contextualisés. Il s’agit en particulier de rechercher ces effets non seulement dans les objets directement issus des échanges à longues distances mais aussi et surtout dans les transformations sociales, culturelles, économiques ou technologiques. Ce thème est introduit par K. Kristiansen (p. 6-8) qui propose une réflexion théorique sur la notion d’échange et d’interaction durant l’âge du Bronze. Il présente ainsi la manière dont les autres contributions de l’ouvrage s’intègrent dans le cadre de ce modèle.

N. Papadimitriou et Demetra Kriga (p. 9-21) centrent leur attention sur la Méditerranée orientale et le Proche-Orient. Les auteurs dessinent l’évolution des échanges du Bronze moyen à la fin du Bronze final. Ils montrent comment des communautés “périphériques” (Levant, Chypre, Mer Egée) ont adopté diverses stratégies (e.g. spécialisation) pour s’introduire au sein des vastes systèmes commerciaux dominés par de grands “centres” politiques et militaires de l’âge du Bronze (empire Hittite, Égypte, Assyrie, Babylonie) et en tirer bénéfice.

Après une introduction claire sur les formes particulières des systèmes commerciaux égéens, M. E. Alberti (p. 22-43) analyse les systèmes du Bronze ancien et surtout du Bronze moyen. Elle met ainsi en évidence des évolutions entre les deux phases ainsi qu’une complexité particulière au sein du Bronze moyen local, période cruciale pour la formation des cultures de l’âge du Bronze. Son travail, agrémenté d’une abondante bibliographie, fait ressortir l’influence mutuelle du développement des circuits commerciaux et des transformations de la société.

S. Vitale et T. Hancock (p. 44-59) étudient la situation de l’habitat de Serraglio à Kos durant le BF IA. Ils discutent de la possible présence de groupes minoens sur le site et proposent de reconsidérer la question d’une forme de colonisation ou de colonialisme. La céramique présente en effet un fort caractère local, tandis que les éléments minoïsants peuvent être liés à une volonté des membres de l’élite locale de mettre en évidence leur statut et à une stratégie commerciale visant à garder une certaine compétitivité dans les échanges. Les auteurs émettent alors l’hypothèse que Serraglio puisse être identifiée comme le dernier “marche pied” reliant la Crète à la côte sud-ouest de la péninsule anatolienne au début du Bronze final.

F. Iacono (p. 60-69) analyse les éléments “occidentalisants” dans le monde égéen pendant l’Helladique récent IIIC. L’originalité de son approche réside dans la remise en question qu’il propose du schéma traditionnel d’une influence univoque des sociétés orientales “civilisées” sur des sociétés occidentales “non civilisées”. Il met en effet en évidence des interactions entre le monde égéen et la Méditerranée centrale en analysant d’une part la distribution de la céramique égéenne (ou ses imitations) en Italie, et d’autre part celles de la “Hand Burnished Ware” et des objets en bronze des “Champs d’Urnes” dans le domaine égéen. L’adoption des éléments “occidentalisants” doit semble-t-il est rattachée à la circulation du métal, dans un contexte social et politique particulier.

La Méditerranée centrale est également au cœur des préoccupations de plusieurs auteurs : A. Cazzalla et G. Recchia (p. 80-91) présentent un tour d’horizon chronologique des transformations des réseaux de relations entre le Sud de l’Italie, Malte et la Sicile. L. Lai (p. 92-101) examine la région de Sàralla (Sardaigne), sous le prisme de l’influence réciproque entre la différentiation sociale et l’accès au métal et au basalte. C. Iaia (p. 102-116) analyse l’expression de l’identité et du statut à la transition Bronze-Fer en Italie centrale, au travers d’assemblages funéraires masculins contenant des casques et de la vaisselle métallique similaires à des productions d’Europe continentale. F. Fulminante et S. Stoddart (p. 117-133) comparent le processus d’urbanisation en Étrurie et en Latium Vetus en soulignant notamment le rôle des facteurs économiques, sociaux et idéologiques. Ils font appel à une analyse de loi rang-taille particulièrement efficace pour comparer les deux régions et mettre en évidence les évolutions des formes du peuplement. Ils proposent enfin un modèle de l’organisation de l’Italie centrale à l’époque orientalisante au moyen de polygones de Thiessen (diagrammes de Voronoi) pondérés.

Plusieurs contributions concernent l’Europe continentale. Parmi celles-ci, deux d’entres elles peuvent être rapprochées car elles concernent le contexte funéraire et des types d’urnes spécifiques : S. Sabatini (p. 134-145) étudie la répartition des urnes maisons, décorées d’un visage, ou avec visage et porte, afin de montrer comment de nouveaux modes d’expression se répandent dans le domaine funéraire via des phénomènes d’hybridation, sous l’influence d’interactions interculturelles avec sélection et incorporation d’éléments extérieurs dans la culture matérielle. J. Kneisel (p. 156-158) est une experte des urnes décorées d’un visage de la culture poméranienne. Malheureusement suite au long processus qu’a suivi l’édition de ce volume, son article n’est pas à jour et est paru seulement après son étude synthétique sur le sujet. Après une présentation claire et synthétique de ces urnes, elle se penche sur la question de la distribution des motifs des couvercles à travers une analyse spatiale en cherchant des zones de contacts et des axes d’échanges. Par une étude des connections entre les sites, elle propose ainsi un ensemble de réseaux linéaires structurant sa zone d’étude. En fin d’article, elle tente de comparer les résultats de cette étude d’un système d’échanges à courte distance avec le commerce à longue distance de cyprées et de l’ambre mais la taille de la contribution se prête mal à l’élaboration de cette comparaison ambitieuse, qui apparaît ici seulement comme une annexe à l’étude.

S. Bergerbrant (p. 146-155) examine la distribution d’un type d’épée du bassin carpatique en Lolland (Danemark). Malgré le faible nombre d’exemplaires concernés, l’étude présente l’adoption et les modes d’utilisation spécifiques d’un type d’objet d’importation, par les sociétés danoises de l’âge du Bronze.

Le dernier article du volume par A. Kreiter et al. (p. 169-179) présente les résultats d’une analyse de la céramique graphitée de Dunaszentgyörgy (Hongrie). L’article se compose de trois parties pratiquement indépendantes : un récapitulatif général sur la céramique graphitée dans le monde celtique ; une présentation assez brève sur l’analyse des échantillons, dont les résultats ont déjà été publiés, 1 leur permettant de conclure à une production locale, à l’aide de matières premières locales mais aussi de graphite importé via des échanges à longue distance, et une dernière partie sur les implications sociales de la production de ces céramiques avec des comparaisons portant sur des recherches archéologiques d’autres périodes ou des travaux ethno-archéologiques.

Il s’agit d’un bel ouvrage. Bien que les illustrations ne soient pas en couleur, elles sont généralement de bonne qualité. Les fonds de cartes sont parfois trop épurés, presque schématiques. Parfois l’absence des sources, de la flèche du Nord et des légendes est gênante. La figure 13.2 n’est, par exemple, pas digne du volume. Les contributions sont accompagnées d’une bibliographie riche mais qui n’inclue que partiellement les parutions après 2008.

Ce volume aborde les questions présentées dans l’introduction de divers points de vue. L’orientation commune de l’ouvrage, approcher les échanges via les transformations des sociétés, est résolument originale comme le soulignent les éditeurs dans l’introduction (p. 2). Les cas d’étude présentent des exemples précis et sont accompagnés d’une réflexion théorique sur les concepts. Les approches méthodologiques sont variées intégrant des études typologiques, iconographiques, des analyses physico-chimiques des objets, des comparaisons ethnographiques, de la cartographie. L’essentiel de l’approche spatiale se base sur des cartes de répartition traditionnelles. Il est un peu regrettable que les analyses spatiales plus novatrices aient une place assez limitée dans l’ouvrage. Seules deux contributions proposent des méthodes plus originales de ce point de vue.

Plusieurs contributions ont montré une situation bien plus complexe à un niveau local que le traditionnel “système monde” (ou modèle centre-périphérie) : l’adoption plus ou moins forte des éléments provenant du centre, parfois leur adaptation selon les stratégies des communautés périphériques plus petites, l’influence mutuelle des systèmes locaux et interrégionaux sont des mécanismes complexes qui ont fortement influencé les transformations des sociétés tout comme la forme des réseaux d’échanges.

Il semble que l’objectif de regrouper des études concernant la Méditerranée et l’Europe non méditerranéenne soit partiellement atteint. La plupart des articles concernent en effet la Méditerranée ; les contributions sur l’Europe continentale trouvent difficilement leur place ici et risquent d’être peu visibles aux yeux des spécialistes de l’Europe non Méditerranéenne. Un volume spécifique traitant des réseaux d’échanges dans l’Europe nord alpine et des transformations locales en relation avec la Méditerranée permettrait de compléter les contributions sur le sujet et de toucher un public élargi.

L’objectif de l’ouvrage était très ambitieux tant du point de vue chronologique que géographique. Il est difficile d’obtenir une telle variété de périodes et de régions au travers de seulement douze cas d’étude. Alors que beaucoup d’efforts sont déployés en début d’ouvrage pour lier les contributions entre elles, une synthèse plus complète en fin d’ouvrage, reprenant non seulement les conclusions des présentes études mais aussi des résultats publiés par ailleurs, aurait permis de conclure en menant une réflexion d’ensemble sur la question des relations entre échanges à longue distance et transformations des sociétés. Bien que cet exercice reste à faire, la variété et la qualité des exemples présentés font de cet ouvrage une publication à connaître pour les chercheurs travaillant sur la question des échanges à longues distances et des relations transculturelles. ​

Notes

1. Havancsák, I. – Bajnóczi, B. – Tóth, M. – Kreiter, A. – Szöllősi, Sz., Kelta grafitos kerámia: elmélet és gyakorflat a dunaszentgyörgyi kerámiák ásványtani, petrográfiai és geokémiai vizsgálatának tükrében. Archeometriai Műhely 1 (2009) 39-52 ; Szöllősi, Sz.– Bajnóczi, B. – Havancsák, I. – Kreiter, A. – Szakmány, Gy. – Tóth, M. 2009. Archeometriai vizsgálatok szerepe a kelta grafitos kerámiák régészeti interpretációjában – The role of archaeometrical investigations in the archaeological interpretations of Celtic graphitic pottery. In Ilon, G. (Szerk.) Őskoros Kutatók VI. Összejövetelének konferenciakötete. Nyersanyagok és kereskedelem. Kőszeg, 2009 március 19-21. 385-400. (article en hongrois avec un résumé en anglais). ​