BMCR 2009.07.60

Sepolcri circolari di Roma e suburbio: Elementi architettonici dell’elevato. Workshop di archeologia classica. Quaderni; 2

, Sepolcri circolari di Roma e suburbio: Elementi architettonici dell'elevato. Workshop di archeologia classica. Quaderni; 2. Pisa/Roma: Fabrizio Serra editore, 2009. 110. ISBN 9788862271981. €34.00.

[La table des matières est reproduite à la fin de ce compte rendu.]

Le présent ouvrage est issu de recherches doctorales dirigées par le professeur Patrizio Pensabene, lequel signe d’ailleurs la préface. Ces recherches, consacrées aux tombeaux en tumulus romains, avaient déjà conduit l’auteur à faire paraître, en 1999, un article sur l’un des plus importants monuments du genre qui soit conservé: celui des Lucilii, érigé le long de la Via Salaria.1 Dans la continuité de ce premier travail, il nous propose cette fois une scrupuleuse étude des membra disiecta, mis au jour à Rome et à ses alentours, qu’il est permis de rattacher à l’élévation de sépulcres colossaux de même type, mais aujourd’hui disparus. Dans les dernières décennies, les tombeaux en tumulus romains ont été l’objet de plusieurs synthèses, la dernière en date ayant été publiée en 2002 par Martina Schwartz;2 en concentrant son attention sur un matériel pour l’essentiel inédit, Paolo Montanari leur donne un complément utile, si ce n’est indispensable pour les spécialistes.

Le premier chapitre de l’ouvrage a valeur générale: l’auteur s’y interroge sur la diffusion des tombeaux en tumulus durant l’époque romaine, ainsi que sur la personnalité de leurs commanditaires. Il faut reconnaître que cette partie du travail n’apporte pas grand-chose à ce que l’on savait déjà grâce aux études antérieures; il s’agit néanmoins d’un résumé commode de l’état actuel des connaissances sur le sujet. À Rome, les plus anciens tombeaux en tumulus attestés par l’archéologie sont datés du milieu du I er s. av. J.-C.; les sources littéraires laissent toutefois supposer que cette forme de sépulcre était déjà employée auparavant. Silius Italicus rapporte ainsi que le Sénat fit ériger un tumulus geminus en l’honneur de Cnaeus et Publius Scipion,3 tous deux morts au combat en 211 av. J.-C., lors de la deuxième guerre punique; si l’on se réfère à Lucain,4 c’est également un tumulus qui aurait accueilli les restes de Sylla, décédé en 78 av. J.-C. Le grand tombeau circulaire qu’Auguste fit bâtir sur le Champ de Mars entre 28 et 23 av. J.-C. n’était donc en aucun cas une tête de série; il s’inscrivait au sein d’une tradition déjà ancienne, dont la genèse est certainement à rechercher dans les cultures funéraires italique et étrusque, renouvelées par l’apport de l’architecture sépulcrale hellénistique.5 On peut néanmoins admettre que si le “mausolée” du Princeps ne fut pas un prototype, il contribua largement à revivifier cette tradition: c’est en effet de l’époque julio-claudienne qu’est datée la majorité des tombeaux en tumulus de Rome et d’Italie. Qui les a fait élever? En prenant en compte tous les monuments de la péninsule italique, il apparaît que sur les vingt-deux commanditaires dont le rang est connu grâce aux indications de l’épitaphe, près de la moitié sont des equites; la répartition géographique de ces tombeaux démontre par ailleurs qu’ils ont rencontré un franc succès auprès des élites municipales d’Italie centrale. Il n’est donc pas interdit de suivre Paolo Montanari lorsqu’il affirme que “les sépulcres circulaires ont représenté, surtout durant l’ère augustéenne, une forme d’autocélébration idéale pour l’ordre équestre” (p. 18); pour les membres de cet ordre, ils constituaient sans doute également une manière d’affirmation de leur fidélité et de leur loyauté à l’Empereur.

Le deuxième chapitre correspond au catalogue; il s’agit du plus long de l’ouvrage. Les blocs sont classés en fonction de leur provenance; Paolo Montanari en a recensé cinquante-six, ayant appartenu à vingt-six monuments différents. Près des trois-quarts ont été mis au jour le long de la Via Appia;6 la moitié d’entre eux sont inédits. Les notices sont soigneusement construites et fort détaillées; les photographies, reportées en fin de volume, sont de bonne qualité. La grande majorité des pierres que l’auteur a pu dater appartient à la seconde moitié du I er s. av. J.-C. et à la première moitié du I er s. apr. J.-C.; une bonne partie d’entre elles sont attribuables au règne d’Auguste. Si, ainsi qu’on peut le constater ailleurs qu’à Rome, le type ne perdure guère au-delà de l’époque julio-claudienne, l’un des blocs étudié par Paolo Montanari (no 35) peut néanmoins être daté du règne de Trajan ou de celui d’Hadrien: le somptueux sépulcre circulaire de ce dernier aurait-il donné une seconde vie à un genre de tombeau qui n’était visiblement plus guère à la mode depuis plus d’un demi-siècle? Difficile à dire car la datation de cet élément architectonique demeure imprécise.

Le troisième et dernier chapitre de l’ouvrage constitue une remise en contexte architecturale et stylistique des pièces étudiées; il est fort court, puisqu’il ne compte que deux pages et demi. La structure de ces tombeaux peut aisément être restituée: une base; un cylindre de pierre retenant les terres du tumulus et recevant l’épitaphe; une architrave; une corniche, qui a pu être surmontée de merlons comme c’est le cas sur le tombeau de Caecilia Metella, cette particularité témoignant sans doute de l’influence de l’architecture militaire. L’auteur retrace enfin les grandes lignes de l’évolution stylistique que laissent deviner ces membra disiecta : par rapport aux sépulcres datés de la fin de la République, ceux de l’époque julio-claudienne accordent ainsi une place plus importante aux motifs décoratifs, parfois empruntés à l’architecture publique.

L’étude de Paolo Montanari se clôt par un long appendice, de près de vingt pages, consacré au Culex, poème de quatre cent quatorze hexamètres attribué à Virgile dès l’Antiquité. Rappelons que cette oeuvre narre la mort d’un moustique, écrasé d’un revers de main par un berger après qu’il l’eut piqué afin de le prévenir de la morsure d’un serpent; par la suite, le culex apparait à son meurtrier en songe et lui demande instamment de lui ériger un tombeau auquel le gardien de chèvre donne précisément la forme d’un tumulus, ” quem circum lapidem leui de marmore formans conserit” (v. 397-398). Le Culex a été considéré par un certain nombre de savants, de Franz Dornseiff à Henner von Hesberg, comme une critique indirecte adressée à Auguste en raison du faste qu’il déployait dans l’architecture de son “mausolée”. Paolo Montanari prend le contrepied de cette hypothèse: sans être totalement affirmatif sur ce point, il reconnaît dans le Culex, dont l’attribution à Virgile a été remise en cause dès la fin du XVII e s. par le Père La Rue, l’oeuvre d’un imitateur du Mantouan, écrivant peut-être sous le règne de Tibère ou de Claude; pour l’auteur, le sépulcre construit par le berger ne serait dès lors rien d’autre qu’un “mausolée poétique” (p. 76), inspiré par un type de tombeau qui était alors très en vogue. Les arguments avancés, puisés aussi bien dans le texte même que dans les connaissances archéologiques et épigraphiques acquises durant les dernières décennies sur les sépulcres en tumulus romains, emportent l’adhésion; on peut néanmoins douter que cette controverse, qui a aujourd’hui plus de trois siècles, puisse jamais être définitivement tranchée.

Pour conclure, répétons qu’il s’agit là d’un ouvrage dont les spécialistes de l’architecture funéraire romaine tireront un grand bénéfice, en particulier ceux qui s’intéressent à ces tumulus qui ont connu un si grand succès à Rome et dans certaines provinces de l’Empire durant la première moitié du I er s. apr. J.-C.7 Le catalogue détaillé publié par Paolo Montanari leur offrira certainement de bons points de comparaison afin d’affiner la chronologie des monuments qu’ils étudient ou seront amenés à étudier. On ne peut donc adresser qu’un seul reproche à cet ouvrage: sa brièveté. En effet, il y avait là plutôt matière à deux gros articles, l’un consacré aux membra disiecta, l’autre au Culex, qu’à un ouvrage. La lenteur des délais de parution dans les revues scientifiques invite toutefois à se demander si l’auteur n’a pas fait un choix tout à la fois raisonnable et prudent en réunissant ces deux études dans un petit livre. Table des matières:
Premessa (Patrizio Pensabene), 9.
Introduzione, 9-10.
1. La diffusione dei tumuli in età romana. Tracce sulla committenza, 11-20.
2. Catalogo degli elementi architettonici, 21-52.
2.1. La via Appia, 21-43.
2.2. La via Prenestina, 44.
2.3. La via Salaria, 45-48.
2.4. La via Flaminia, 48-50.
2.5. Il Trastevere, 50-51.
2.6. La via Ostiense, 51-52.
2.7. La via Ardeatina, 52.
3. Inquadramento architettonico-stilistico, 53-55.
Conclusioni, 56-57.
Appendice: Tumulus ed elogium nel Culex : Aspetti storico-archeologici, 58-76.

Notes

1. Montanari (P.), “Primi elementi sul sepolcro dei Lucilii”, Bullettino della Commissione archeologica comunale di Roma, 100, 1999, p. 167-196.

2. Schwarz (M.), Tumulat Italia tellus. Gestaltung, Chronologie und Bedeutung der römischen Rundgräber in Italien, Rahden, 2002. Voir aussi Eisner (M.), Zum Typologie der Grabbauten im Suburbium Roms, Mayence, 1986; Hesberg (H. von), Monumenta. I sepolcri romani e la loro architettura, Milan, 1994, p. 113-134; Gros (P.), L’architecture romaine. 2, Maisons, palais, villas et tombeaux, Paris, 2001, p. 422-435. Plus ancien, mais toujours utile: Fellman (R.), Das Grab des Lucius Munatius Plancus bei Gaëta, Bâle, 1957, p. 63-98.

3. Silius Italicus, XIII, 659-660.

4. Lucain, Pharsale, II, 222.

5. Sur ce point, ajouter à la bibliographie de l’ouvrage: Davies (P. J. E.), Death and the Emperor. Roman Imperial Funerary Monuments from Augustus to Marcus Aurelius, Austin, 2004, p. 13-19, 49-67.

6. Nombre de ces blocs ont été remployés dans le castrum Caetani, accolé au tombeau de Caecilia Metella; ils avaient déjà été signalés par Paris (R.), Via Appia. Il mausoleo di Cecilia Metella e il Castrum Caetani, Milan, 2000.

7. Pour la Gaule, voir notamment Castorio (J.-N.), Maligorne (Y.), Une tombe monumentale d’époque tibérienne à Nasium (cité des Leuques), Paris, 2007. Voir également Balty (J.-C.), “Des tombeaux et des hommes: à propos de quelques mausolées circulaires du monde romain” dans Moretti (J.-C.), Tardy (D.) (éd.), L’architecture funéraire monumentale: la Gaule dans l’Empire romain, Actes du colloque organisé par l’IRAA du CNRS et le musée archéologique Henri-Prades, Lattes, 11-13 octobre 2001, Paris, 2006, p. 41-54.